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Législation concernant les activités religieuses et l’organisation des cultes

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Circulaire du ministère de l’Education nationale n°2002-120 du 29 mai 2002 Dispositif de lutte contre les sectes mis en place au sein de l’éducation nationale

NOR : MENG0201195C
BOEN n° 23 du 6 juin 2002

Texte adressé aux rectrices et recteurs d’académie

La loi du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales définit les sectes comme des organisations qui poursuivent "des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d’exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités".
La vulnérabilité des jeunes face à l’action de telles organisations fait peser sur le ministère de l’éducation nationale une obligation particulière de vigilance. Il appartient en effet au ministère de veiller à ce que l’école ne soit pas un terrain de prosélytisme pour les organisations à caractère sectaire et de s’assurer qu’aucun enfant n’est privé du droit à une éducation qui lui permette, comme le prévoient les articles L. 111-1 et L. 122-1 du code de l’éducation, de développer sa personnalité, d’élever son niveau de formation initiale et continue, de s’insérer dans la vie sociale et professionnelle et d’exercer sa citoyenneté.
L’action du ministère dans la lutte contre les sectes prend diverses formes.
Dans l’enseignement public, le principe de laïcité garantit le respect de la liberté de conscience de chacun. Ce principe impose aux personnels une stricte obligation de neutralité vis à vis tant de leurs propres convictions que de celles des élèves. Il interdit aux élèves et à l’ensemble des membres de la communauté éducative de faire de l’école un lieu de prosélytisme pour quelque croyance que ce soit.
Dans les établissements privés sous contrat qui, même s’ils ne sont pas soumis au principe de laïcité, ont vocation, comme l’enseignement public, à accueillir tous les enfants sans distinction d’origine, d’opinion ou de croyance, la loi impose que l’enseignement soit donné "dans le respect total de la liberté de conscience". Il appartient au ministère de l’éducation nationale de vérifier que cette exigence est satisfaite.
Au delà de l’enseignement public et de l’enseignement privé sous contrat, il est de la responsabilité du ministère de veiller à ce que la liberté de l’enseignement proclamée par l’article L. 151-1 du code de l’éducation ne fasse pas l’objet d’un détournement de la part d’organisations à caractère sectaire. Cette mission passe notamment par le contrôle de l’enseignement assuré dans les familles et dans les établissements d’enseignement privés hors contrat afin de vérifier qu’il est conforme au droit de l’enfant à l’instruction tel qu’il est défini à l’article L. 122-1.
Il appartient également aux personnels de l’éducation nationale, comme à tous les agents publics, d’alerter les services compétents (services de protection de l’enfance, procureur de la République) lorsqu’ils découvrent, dans l’exercice de leurs fonctions, qu’un enfant se trouve en situation de danger du fait des agissements d’une organisation à caractère sectaire.
Si le ministère a le devoir d’agir pour éviter que l’enseignement ne soit un vecteur du prosélytisme sectaire et pour protéger les personnes exposées aux agissements des sectes, l’action en la matière est particulièrement délicate et doit être conduite avec la plus grande précaution. Il n’est pas toujours facile en effet de distinguer entre un phénomène sectaire, qui doit être dénoncé et combattu, et ce qui relève de l’exercice normal des libertés de culte et de conscience, qui doivent être respectées et protégées.
Pour ces raisons, le ministère a mis au point un dispositif de vigilance qui repose sur un réseau d’expertise dont la direction vient d’être confiée à M. Joël Goyheinex, inspecteur général de l’éducation nationale.
Le réseau d’expertise du ministère comprend :
a) Au niveau national : la cellule chargée de la prévention des phénomènes sectaires dans l’éducation (CPPS), placée auprès du directeur des affaires juridiques. La cellule est dirigée par un inspecteur général de l’éducation nationale (IGEN), secondé par un inspecteur général de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR). Elle appuie son action sur les corps d’inspection. La CPPS a pour mission :
 de conseiller les cadres de l’éducation nationale confrontés aux problèmes sectaires, de leur fournir une documentation et, si nécessaire, d’accompagner leur action sur le terrain ;
 de veiller à la formation des personnels d’inspection et d’encadrement ;
 de sensibiliser les personnels dans le cadre du dispositif de vigilance relevant de l’autorité des inspecteurs d’académie, directeurs des services départementaux de l’éducation nationale (IA-DSDEN) ;
 de favoriser l’information des élèves, notamment dans le cadre de l’éducation civique, juridique et sociale ;
 d’analyser les évolutions du phénomène à partir des informations émanant des académies et de formuler des propositions ;
 d’animer un réseau de responsables académiques, conseillers des recteurs et correspondants de la CPPS ;
 de participer aux réflexions et aux initiatives interministérielles.
b) Au niveau académique : chaque recteur désigne un conseiller, correspondant académique de la CPPS, chargé de seconder les IA-DSDEN pour toutes ces questions. Ce conseiller peut animer également des séances de formation initiale et continue au sein des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) et intervenir dans la formation initiale des personnels d’encadrement.
Par ailleurs, l’action du ministère s’intègre dans le cadre du dispositif national de lutte contre les agissements répréhensibles des organisations sectaires, qui comprend :
 Une mission interministérielle de lutte contre les sectes (MILS) instituée par le décret n° 98-890 du 7 octobre 1998 ; celle-ci se compose notamment d’un groupe opérationnel qui réunit les représentants des principaux ministères concernés. Pour le ministère de l’éducation nationale, il s’agit de l’inspecteur général de l’éducation nationale, responsable de la CPPS, et du directeur des affaires juridiques.
 Les "cellules départementales de lutte contre les agissements répréhensibles des mouvements sectaires" animées par les préfets (circulaires du ministre de l’intérieur du 7 novembre 1997 et du 20 décembre 1999). Les IA-DSDEN sont invités à participer activement et à tenir la CPPS régulièrement informée des travaux qui y sont menés, en particulier ceux qui concernent l’éducation nationale. Ils sont également conviés à établir, chaque fois que nécessaire, une relation avec le magistrat du parquet général désigné pour suivre ces problèmes (circulaire ministre de la justice du 1er décembre 1998).
Il incombe aux recteurs de tenir la CPPS systématiquement informée de toute question susceptible de relever d’un problème sectaire afin que soient centralisées dans un lieu unique toutes les informations utiles pour apprécier d’une manière aussi précise et complète que possible l’importance du phénomène au plan national. En particulier, les contrôles du respect de l’obligation scolaire prévus par la loi du 18 décembre 1998, codifiée aux articles L. 131-1, L. 131-2 et L. 442-2 du code de l’éducation, doivent être effectués en liaison étroite avec la cellule.
L’action qui a été conduite depuis la mise en place de la CPPS a donné des résultats satisfaisants. Il importe de la poursuivre de telle sorte que chaque élève puisse recevoir, comme la loi lui en reconnaît le droit, une éducation qui favorise son épanouissement personnel et le développement de son esprit critique, et qui le prépare à l’exercice de la citoyenneté.

Pour le ministre de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche et par délégation,
Le directeur des affaires juridiques
Thierry-Xavier GIRARDOT